Vision et création
L'idée a émergé de l'esprit de Philippe Poitras, éditeur du média, en 2013, après avoir constaté que le journalisme environnemental était très négatif et concentré sur l’inaction des acteurs depuis quarante ans. À l'autre bout du spectre se trouvait la communication militante des groupes écologistes. Entre les deux : un océan. M. Poitras s'est alors demandé s'il y aurait une possibilité de parler d’action climatique de façon non militante ou partisane, au Québec.
« Nous sommes le seul média qui a ce positionnement-là au Québec, de manière constante, lance M. Poitras. Certains le font occasionnellement, mais ce n'est pas leur priorité. »
Ligne éditoriale
Unpointcinq est donc un média de solutions centré sur l’action climatique. Les sujets traités englobent tout ce qui est lié à la réduction de gaz à effet de serre et à l'adaptation aux changements climatiques.
« Nous voulons montrer tout ce qu’il se passe au Québec, que l’action est possible et désirable et qu’on peut tous contribuer à notre niveau », lance Geoffrey Dirat, rédacteur en chef depuis un an et demi.
Le média est lancé en 2017 par Philippe Poitras pour faire contrepied à la manière négative dont on parle des changements climatiques. « Les médias non spécialisés traitent surtout des conséquences des changements climatiques, ce qui crée plutôt un phénomène de distanciation, ajoute M. Dirat. L’idée est de rapprocher les enjeux climatiques du quotidien des Québécois. »
La politique éditoriale est organisée en fonction de trois volets: S'inspirer, Comprendre et Agir. Les sujets sont répertoriés selon sept catégories distinctes que sont l'alimentation, la mobilité, le mode de vie, l'habitat, l'innovation, l'économie et le mieux-être.
« Souvent les journalistes nous proposent des sujets liés à l’environnement et on essaie de les requalifier », explique Geoffrey Dirat. Il prend l’exemple du plastique, qui nécessite des ressources fossiles pour être produit puis traité comme déchet. Mais, une fois dans la nature, il ne génère pas de gaz à effet de serre (GES). Ainsi une collecte de plastique ne sera pas couverte par le média. « Par contre, on couvrira l’histoire de quelqu’un qui recycle du plastique, car cela permet d’éviter une nouvelle production et donc de diminuer les GES », nuance-t-il.
Un « laboratoire vivant »
Unpointcinq est un média qui produit des contenus journalistiques, mais il fait partie d'un projet plus vaste dans lequel il joue un rôle de « laboratoire vivant », selon Philippe Poitras. Depuis sa création, il est associé à un projet de recherche universitaire en marketing social et psychologie comportementale qui analyse régulièrement les articles et les vidéos.
Deux chercheuses principales sont associées au projet, Pénélope Daignault et Valériane Champagne St-Arnaud, de l’Université Laval. Elles ont produit un premier rapport en 2019, qui a été soumis à Ouranos, un consortium sur la climatologie régionale et l'adaptation aux changements climatiques. Cet organisme à but non lucratif développe des projets collaboratifs impliquant un réseau de 450 chercheurs, experts, praticiens et décideurs issus de différentes disciplines et organisations. Ouranos fait partie des partenaires scientifiques du média, au même titre que Réseau Environnement, un regroupement de spécialistes en environnement au Québec, ainsi que l'Université Laval.
Le rapport établit un portrait psychographique des Québécois à l’égard des changements climatiques, vérifie l’intérêt général des Québécois pour Unpointcinq, de même que l’intérêt pour du contenu médiatique plus spécialisé.
Il a permis d’établir une stratégie de cadrage pour le contenu journalistique du média : il doit proposer « des angles de traitement inattendus et inspirants […] pour stimuler l’engagement environnemental des Québécois. Près de 6 répondants sur 10 ont déclaré y voir une forte pertinence et avoir une forte intention de le consulter.
« Le changement survient rarement grâce à la confrontation; généralement, plus on essaie de forcer le changement, plus on rencontre de résistance »
(Stocknes, 2015) tel que traduit et cité dans le rapport.
Un portrait détaillé des Québécois a été réalisé à partir de variables psychographiques (attitudes, croyances, comportements relatifs à la lutte contre les changements climatiques, etc.) et de variables sociodémographiques telles que l’âge, le sexe, le revenu familial, etc. L’étude a permis de segmenter la population en trois groupes distincts, soit les Engagés intéressés (56,6 %), les Engagés désintéressés (29,4 %) et les Désengagés désintéressés (12,9 %).
Ceux qui présentent le plus haut intérêt pour Unpointcinq, les Engagés intéressés sont ciblés en premier comme lectorat de base, qui peut « relayer les contenus du média dans leurs propres réseaux et ainsi faire connaître le média ». Cette base devrait être élargie progressivement pour rejoindre les deux autres groupes identifiés, car « pour provoquer une modification des normes sociales en dehors des cercles d’initiés, il faudra viser des publics plus éloignés du sujet. »
Pour se démarquer à l’ère de l’infobésité, l’étude suggère que la stratégie communicationnelle du média se concentre sur l’action climatique sur un ton simple, vulgarisé, divertissant, informatif et crédible. C’est ce type de contenu qui « stimulera l’intérêt des premiers lecteurs et favorisera son partage sur les médias sociaux. C’est la clé du succès pour ce média du 21e siècle ».
Le Baromètre de l’action climatique
L’équipe d’Unpointcinq ne s’est pas arrêtée à ce premier rapport et continue de se baser sur des études et des sondages réalisés dans le cadre de ce projet de recherche. En 2019, le média publie le premier Baromètre de l’action climatique au Québec qui mesure le niveau de disposition des Québécois et des Québécoises face aux défis climatiques. Ces données sont destinées autant aux médias qu’aux citoyens, gouvernements, entreprises ou organisations environnementales.
Cette étude s’appuie sur un sondage réalisé par la firme Léger en septembre 2019 auprès de 2006 adultes québécois et dégage plusieurs constats. Nous en avons sélectionné trois :
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Une large majorité des Québécois (79%) se déclarent « fortement préoccupés par les problèmes environnementaux en général, ce qui les rend donc susceptibles de s’intéresser à la question des changements climatiques. »
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La majorité des Québécois (54%) croient que « leurs choix quotidiens contribuent aux changements climatiques, mais on constate qu’ils surestiment largement l’impact de nombreux gestes individuels, ce qui démontre un besoin d’éducation sur ce sujet complexe. »
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Près de neuf Québécois sur dix affirment faire déjà des efforts pour réduire leur impact sur le climat, et 76% souhaitent en faire plus.
Profils climatiques
Le Baromètre de l’action climatique a également permis de diviser la population en cinq sous-groupes distincts : les décidés (fortement préoccupés par les enjeux environnementaux), les consciencieux (motivés à faire leur part), les réciproques (un peu plus préoccupés que la moyenne), les inquiets (motivés à faire leur part, mais avec de l'aide) et les détachés (ne comprennent pas pourquoi ils devraient agir).
Ces données sont utilisées par le Laboratoire sur l’action climatique et le média pour définir des stratégies de communication encore plus ciblées.
Une seconde édition du Baromètre de l'action climatique est prévue pour 2021. Actuellement, le laboratoire compare un groupe test composé de personnes qui consultent le média, à un groupe qui ne lit pas les contenus. Cette analyse permettra de vérifier si les articles et les vidéos ont eu un impact sur le comportement et l'attitude des gens qui se sont informés par le biais d’Unpointcinq. Cette phase d’étude durera jusqu’en mars 2021.
ORGANIGRAMME
L'équipe éditoriale d'Unpointcinq est constituée d'un rédacteur en chef et de plus d'une douzaine des journalistes pigistes plus ou moins réguliers, provenant et différentes régions du Québec, de la Côte-Nord au Saguenay, en passant par l'Abitibi.